APPEL Cœur du Jura
Lettre de Scolopax n°20
Bonjour,
J’assistais l’autre soir à ce théâtre assez inégal que donne à intervalles réguliers le conseil municipal d'Arbois. Quand vint le tour de se prononcer sur certaines modalités du projet éolien que l'on compte dresser sur le chemin de ma migration, une voix de l'opposition s'est élevée pour poser la question de l'utilité d'un projet renforçant le phénomène des « heures négatives » : elle fut immédiatement étouffée. Interdit d’en savoir plus sur cette absurdité supplémentaire des énergies dites renouvelables. La question était pourtant pertinente ...
Rappelons tout d'abord que les « heures négatives » sont celles durant lesquelles la production d’électricité est supérieure à la consommation et les prix inférieurs à ceux du marché.
En quoi est-ce dramatique ? Et bien comme l'électricité produite ne peut être stockée, il faut donc trouver des solutions pour la consommer dans l’instant. L'une d'elles est de payer un gros utilisateur ( ex : Solvay) pour absorber une partie du surplus d'électricité en lançant une production énergivore qu'il n'avait pas prévu et/ou dont il n'avait pas besoin à cet instant. Une autre solution est d'exporter à perte.
Ainsi, ERDF, gestionnaire du réseau électrique, doit donc non seulement continuer à rémunérer grassement les producteurs d'EnR à un tarif deux ou trois fois supérieur au prix de base EDF, mais encore payer un consommateur qui accepte de le débarrasser du surplus d'électricité que ces EnR génèrent et dont personne n’a besoin.
Face à la prise d'ampleur du phénomène (8% au 1er semestre 2025 contre 1.2% en 2022), la Commission de Régulation de l'Energie (CRE), dans une note du 26/11/24, a demandé aux producteurs d'éolien et solaire de se déconnecter du réseau, tout en leur prévoyant une compensation financière pour cette non-production.
Voici deux cas concrets de l'observation du phénomène dans la consommation électrique nationale :
Premier exemple (graphique 1) le 24 mai 2025, journée de fort ensoleillement. Malgré une baisse importante de la production nucléaire, on a atteint des prix négatifs en milieu de journée et il a fallu déconnecter une bonne part du parc solaire. C’est ce mécanisme assez stupide qui explique la gigantesque panne (grande apagon !) du réseau espagnol cet été.
Second exemple (graphique 2) le 3 septembre 2025, jour de grand vent, une part importante des sites éoliens est mise à l’arrêt en raison de la surproduction.
On comprend ainsi que le phénomène des heures négatives est fortement lié à l’apparition d’énergies renouvelables, non maîtrisables, qu’il faut accepter quand elles fonctionnent et non quand on en a besoin. Car oui, rappelons que ces EnR sont soit totalement absentes pour le solaire au moment de la pointe de consommation en soirée durant l’hiver, soit au régime réduit pour l’éolien aux périodes de grand froid (2)... comme aux périodes de canicule d’ailleurs.
On déduit en outre que le phénomène des heures négatives ne pourra que croître, au fur et à mesure de l’extension des sites éoliens et solaires, et faire encore monter le coût de l’électricité (1).
Comble de l’ironie : ces énergies renouvelables, surabondantes quand on en a le moins besoin, sont, soit totalement absentes pour le solaire au moment de la pointe de consommation en soirée durant l’ hiver, soit au régime réduit pour l’éolien aux périodes de grand froid (2)... comme aux périodes de canicule d’ailleurs.
Quant au résultat de ces soudaines variations ?
-Une bonne affaire pour les promoteurs éoliens ou solaires puisque l’État a prévu de compenser leurs pertes de production en les rémunérant même s’ ils sont au repos. Et pas pour une bagatelle ! puisque l’éolien terrestre atteint un niveau de profit de 30 % alors que son niveau réel de production est de 23 % en moyenne. Idem pour le solaire dont le niveau de bénéfice passe artificiellement à 50 % pour un taux réel de production de 20 % en moyenne. Belle rente donc qui démontre une fois de plus à qui profite l’absurdité du système !
-Une mauvaise affaire pour les consommateurs qui passent à la caisse et ne cessent de voir leur facture monter.
Ainsi la question de savoir si des collectivités doivent chercher à tout prix des profits et se comporter comme des promoteurs ou contribuer à des prix plus modérés pour leurs administrés reste donc posée . A chacun de choisir son camp !
Quoiqu'il en soit, nous vivons décidément une époque merveilleuse !
Scolopax
(1) Les heures négative sont passées d’un maximum de 102 jusqu’en 2022, à 147 en 2023, 359 en 2024 et déjà 368 pour le seul premier trimestre 2025 !
(2) Le réseau allemand est passé tout près du black out à deux reprises durant l’hiver 2024-2025 du fait de brouillards givrants persistants (Dunkelflaute). Il a été maintenu à flot grâce au nucléaire français ...et à la centrale à charbon de Saint Avoldt.

